vendredi 10 novembre 2017


Publié le 8 novembre 2017
Journal Les Affaires
Par François Remy

L'envol du bitcoin, c'est le concours du plus idiot

IInestimable. La prouesse informatique derrière le bitcoin a énormément de valeur. La transparence, la décentralisation, l’inviolabilité, c’est le rêve d’Internet devenu réalité. Voilà une bonne raison pour acheter du bitcoin, me direz-vous. Et les gens en achètent, il suffit de voir l’envolée du cours, une croissance de près de 700% depuis janvier. En comparaison, l’action d’Apple enregistre «seulement» 51% de hausse sur la même période.

Et au moment d'écrire ces lignes, la devise électronique vient de toucher un nouveau record d'altitude à plus de 7879 $US (10020 $CA). Mais devrions-nous tous plonger dans les méandres des cryptomonnaies pour autant? Comme dirait le célèbre gestionnaire Peter Lynch, avant d’investir dans quelque chose, il faut savoir expliquer pourquoi à un écolier. Dans un langage assez simple pour que le gamin comprenne et assez rapidement pour éviter qu’il s’ennuie. Bref, bonne chance avec la «pièce numérique»!
Les voix dissidentes n’ont pas attendu la flambée des derniers jours pour s’élever contre le bitcoin. Dès son apparition, les plus réfractaires ont estimé que quitte à miser sur du vent, autant investir dans l’éolien.

Toutefois, les critiques visent désormais le piège émotif qui se referme sur les foules d’acheteurs. Le pouvoir d’attraction exercé par le bitcoin porte bien au-delà des clubs d’informaticiens et autres enfants spirituels des cypherpunks. Tout le monde en parle.
En un clic sur Google, où le premier résultat de recherche sera une pub invitant au trading, des particuliers comme vous et moi se retrouvent face à la tentation du pognon. L’illusion de l’argent facile. Pour quelques pièces, on peut s'offrir une miette du grand gâteau… 

«Des engouements superficiels qui relèvent de comportement mimétique, conduisent à une spirale haussière. On ne m’enlèvera pas de l’idée qu’elle est spéculative», partageait récemment Bruno Colmant, économiste belge de renom et directeur de la recherche macro pour la banque privée Degroof Petercam. 

Foi d’ancien président de la Bourse de Bruxelles, Burno Colmant insistait alors en rappelant que «pour (presque) chaque bitcoin acquis à prix d’or, il y a un vendeur qui encaisse des monnaies traditionnelles sonnantes et trébuchantes».

Piège à cons ?


C’est assez convaincant de se répéter que si la valeur du bitcoin ne cesse de monter en flèche, c’est parce qu’une bulle se forme, parce que le cercle vicieux happe de plus en plus de victimes consentantes. Quel autre élément pourrait sinon expliquer les 1000$US gagnés en une semaine?

«La couverture médiatique peut avoir une grande influence sur sa valeur, et ce, sur une courte période, sans qu’aucun organisme ou mécanisme officiel n’encadre cette variation», met en garde l’autorité des marchés financiers québécoise.

Avouons-le, les consommateurs ne recourent pas naturellement au bitcoin dans la vie de tous les jours, il n’y a pas de signe d’inflation, tous les criminels de la planète n’ont pas soudainement choisi de blanchir en bitcoin et le fait que son protocole, la blockchain, gagne en popularité dans le monde des affaires n’a que peu d’influence sur la cherté du BTC…

Péché capital(iste)


Le magazine The Economist pense voir plus clair, en appliquant une lecture toute simple à cette croissance effrénée du bitcoin: l’envie. Ou plus précisément, ce désir plus ou moins violent qui torture les admiratifs de la réussite d’autrui.



« Il n'y a rien de plus troublant que de voir un ami devenir riche »

«Il n'y a rien de plus troublant pour le bien-être et le jugement que de voir un ami devenir riche», écrivait l’historien des bulles, Charles Kindleberger.

Et The Economist de conclure que le bitcoin démontre la théorie du «greater fool».

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